Écologistes & Politique : Démissionner ou Résister ?

Aujourd’hui c’est la gueule de bois. Nous sommes tous encore sous le choc de l’annonce de la démission de Nicolas Hulot en direct à la radio au matin du 28 Août 2018.

Cet aveu d’impuissance signe-t-il l’échec de l’écologie en politique ?

Les écologistes convaincus doivent-ils se concentrer désormais sur d’autres formes d’action ?

Je crois pour ma part qu’il ne faut surtout pas abandonner le terrain de l’action politique.

Hulot n’a pas échoué. Il a été mis en échec.

D’abord par des affaires pour le fragiliser (ses voitures, ses revenus, ses relations…) et des désaveux en série sur des sujets qui lui tenaient à cœur (énergie, pesticides, biodiversité, etc.). Poussé dans ses derniers retranchements, caricaturé comme un utopiste, on a poussé l’homme à quitter la scène.

Nicolas Hulot a eu cette phrase terrible pendant son interview : « J’ai un peu d’influence. Je n’ai pas de pouvoir. » Et c’est bien là le problème : un Ministre d’Etat qui n’a pas le pouvoir décisionnaire et les coudées franches ne peut pas mettre en oeuvre un programme qui implique transversalité et collégialité.

Comment imaginer que le Ministre à la transition écologique donne un cap pendant que le Ministre de l’Agriculture tient un tout autre discours ?

Pour être efficace, une politique environnementale ambitieuse devrait s’imposer aux autres ministres, et devrait faire fi du lobbying intensif qui gangrène les politiques environnementales (et pas seulement d’ailleurs).

Ce ne sont pas les hommes, ou les femmes, qui ont occupé ce poste qui sont responsables de la « politique des petits pas » en matière d’environnement, mais bien le système qui les cantonne à un rôle de faire-valoir ou de caution verte.

Dans le système actuel, seuls les premiers décideurs ont la capacité de faire bouger les choses : Premier Ministre, Président de la République bien sûr, mais aussi et surtout les élus locaux comme les maires.

Je crois dur comme fer que la transition écologique passera par les communes et les territoires. Il faut commencer à mettre en oeuvre à petite et moyenne échelle la société durable à laquelle aspire la majorité de nos concitoyens pour ensuite faire école à l’échelon national.

Pour cela, il faudra que les écologistes continuent d’investir la scène politique, que de nouveaux éco-citoyens se lancent dans l’aventure et se fassent élire à des postes à responsabilités.

Il faudrait aussi arriver à dépolitiser l’écologie. L’écologie n’appartient ni à la gauche, ni à la droite. Elle devrait rester avant tout citoyenne.

A mon petit niveau d’adjoint à l’environnement sans étiquette dans une ville moyenne, je me rends compte au quotidien de la difficulté du poste.

Les attentes des citoyens sont grandes en matière d’écologie, mais les moyens mis à la disposition des élus qui en ont la charge ne sont pas toujours à la hauteur.

Dans ces conditions, dans la conception de la « vieille politique », on peut soit décider de s’en accommoder, soit démissionner. « Un Ministre ça ferme sa gueule ou ça démissionne » comme l’avait proféré Chevènement.

Il existe peut-être une troisième voie qui serait celle de rester et « d’ouvrir sa gueule » justement.

Démissionner quand on porte des convictions écologiques devrait toujours être le dernier recours.

Partir c’est prendre le risque qu’il n’y ait plus de garde-fou et que l’écologie passe au second plan.

Mais il arrive un moment où on ne peut « plus se mentir » et la démission devient alors inéluctable.

Il faut respecter ce choix mais il ne faudrait pas que cette démission entraîne une vague de désertion du terrain politique par les défenseurs de l’environnement à un moment de l’histoire de l’humanité où on a le plus besoin d’eux.

Si vous ne l’avez pas écouté, voici l’entretien intégral de Nicolas Hulot sur France Inter :

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