Communauté unique Pays Basque : Y aller ou pas ?

Débat passionnant ce soir au conseil municipal de Biarritz où pas moins de 19 conseillers ont pris la parole pour argumenter leur avis sur le projet d’EPCI unique proposé par le préfet dès 2017.

Pas de position de groupe pour Biarritz Vague d’Avenir sur ce sujet. Voici l’intervention prononcée par Guillaume Barucq pour expliquer son choix personnel :

« Monsieur le Maire, mes chers Collègues,

Je m’exprime ici en mon nom, et non en celui de mon groupe Biarritz Vague d’Avenir, car chacun de nous votera ce soir en son âme et conscience.

En tant que surfeur, j’ai l’habitude de regarder les cartes pour guetter l’arrivée de la houle. En observant la carte du Pays Basque ce matin, j’ai vu une grande vague arriver. Mais cette vague ne venait pas de la mer, elle venait de l’intérieur du Pays Basque.

Cette vague, ce sont les dizaines de communes (plus de 50 à ce jour) qui ont déjà dit oui à une communauté rassemblant l’ensemble du Pays Basque Nord.

On ne peut pas être sourd à cette envie d’avancer ensemble.

Biarritz ne peut pas continuer à jouer la belle indifférente qui regarde vers la mer en tournant le dos à l’intérieur.

L’intérieur nous envoie un signal fort et Biarritz se doit d’assumer son rôle de ville motrice pour faire avancer notre territoire.

Nous avons déjà l’aéroport Biarritz – Pays Basque qui est la porte d’entrée aérienne sur le territoire, un service municipal de la langue basque unique en son genre, et une volonté politique incontestée depuis des années en faveur de la langue et de la culture basque.

L’événement incontournable qu’est LURRAMA nous rappelait il y a quelques jours l’importance de nos agriculteurs et de nos producteurs au Pays Basque.

Pour un enjeu crucial comme l’environnement, on conçoit aisément l’intérêt qu’il y aurait à travailler tous ensemble et à développer des politiques communes ambitieuses.

On se préoccupe de la qualité des eaux de baignade à Biarritz. Celle-ci dépend en partie des bonnes pratiques agricoles dans l’intérieur (utilisation d’engrais, de pesticides…). Pour la gestion des déchets, Bil Ta Garbi nous prouve à quel point il est cohérent de travailler à l’échelle du territoire.

Je ne veux pas dire non à une communauté unique car un vote négatif massif de notre part serait interprété comme une fin de non-recevoir.

Je ne veux pas non plus insulter l’avenir, car quel que soit notre vote, cette communauté pourrait voir le jour au 1er Janvier 2017.

Il faudra rapidement décider où on va. Mais à ce jour, trop d’incertitudes pèsent sur ce projet pour l’approuver en l’état.

Pour la représentativité, il faudra tendre vers un rééquilibrage, sans attendre non plus que l’ACBA soit majoritaire dans la communauté. Dans ce domaine, comme dans d’autres, il faudra accepter de faire un pas vers les autres.

La fiscalité n’est pas non plus à mon sens un obstacle majeur car nous y gagnerons en lisibilité à avoir une fiscalité unique et qu’il sera toujours possible de lisser cette fiscalité dans le temps.

Ce qui m’inquiète davantage, ce sont les compétences. Sur un territoire aussi vaste et avec un tel mode de représentativité, certaines compétences seront difficiles à gérer.

Prenons l’exemple de l’assainissement qui me concerne directement. Biarritz doit faire de lourds investissements dans les années qui viennent sur son réseau. Pour les nouveaux bassins de rétention que j’appelle de mes vœux depuis des mois, il faut obtenir un accord de principe des communes voisines. Sur une Agglo à 5, c’est encore jouable car nous n’avons qu’à convaincre des convaincus. Qu’en sera-t-il demain quand il faudra proposer ces mêmes bassins à des élus de l’intérieur ? Les bassins de rétention de Biarritz seront-ils une priorité pour les élus de Mauléon ou de Charritte-de-Bas ?

Je ne voudrais pas que cette communauté Pays Basque manque d’ambition.

A l’heure actuelle, ce « Pays Basque » n’a pas les compétences d’un pays, ni même d’une région ou d’un département.

Ce Pays Basque aurait les compétences d’une ville. Nous rêvions d’un pays, on nous propose un EPCI. Et je redoute que le Pays Basque ne devienne un grand village si nous nous trompons sur ses compétences.

J’entends souvent dire qu’il faut se regrouper pour espérer exister dans la future grande région. Ce n’est pas le périmètre qui fait la force d’un territoire mais sa cohérence. Pour que notre Pays Basque soit fort, il faut des villes fortes.

J’entendais la députée Colette Capdevielle dire à la réunion d’Agglo sur l’EPCI que « l’échelle communale ne convient plus ». Je m’inscris en faux contre cette affirmation car il faudra évidemment des villes fortes pour tirer le territoire vers le haut et maintenir un lien de proximité avec les citoyens.

Dans un Pays, il y a des régions. Et il faudra des régions fortes dans ce Pays Basque. Là-dessus je rejoins le maire Michel Veunac sur sa proposition de créer dans un premier temps les 3 provinces historiques du Pays Basque Nord : Labourd, Basse-Navarre et Soule.

Il existe enfin 2 raisons pour lesquelles je ne peux pas donner un vote affirmatif dans l’état actuel des choses :

– un mauvais timing : nous venons à peine de lancer enfin le projet d’Agglomération. Repartir de zéro en plein milieu de mandat serait le meilleur moyen pour ne pas avancer pendant cette mandature.

– un déficit de démocratie avec l’absence de vote au suffrage universel.

Les élus en place ne sont pas légitimes à mon sens pour ce futur EPCI. Aucun n’a présenté de projet de territoire pour le Pays basque au cours des dernières élections municipales (même si Martine Bisauta me rétorquera que Jean-René Etchegaray l’avait évoqué en page 20 de son programme).

Pour moi, pour nous, c’est clair : à nouveau territoire, nouvelles élections.

Il ne s’agit pas ici simplement de rattacher Bidart et Boucau à la CABAB, mais bien de créer la plus grande agglomération par le nombre de communes jamais constituée en France. Et nous ne pouvons pas nous affranchir d’une légitimité démocratique pour ce grand projet.

Si cette volonté était satisfaite, si on nous proposait un projet viable et cohérent, alors je pourrais donner un avis positif au mois d’avril.

Mais pour l’heure, comme je ne peux pas voter oui, et que je ne veux pas voter non, je m’abstiendrai pour ce vote. »

 

Revoir l’intégralité des débats : https://ville.biarritz.fr/mairie-pratique/le-conseil-municipal/videos-deliberations/

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1 commentaires

  1. Frappée au coin du bon sens, la position du Dr Barucq est si claire (démocratie) convaincante (Mauléon décidant pour Biarritz) que je ne peux qu’y souscrire. Une fois de plus, les pouvoirs publics mettent la charrue avant les boeufs et dans un pays comme le Pays basque français, il est curieux de voir un tel attelage sans en rire et être certain qu’il ira droit dans le mur. En mon enfance, je voyais à Mouriscot des paysans mener les boeufs et ramasser le foin pour le bétail, cette image ne s’effacera jamais, nostalgie quand tu nous tiens, merci de m’avoir lu, et vive le Pays basque, espagnol et français, basque cela va sans dire.

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